Ainsi :
- Elles ne contreviennent pas au monopole bancaire à condition d’être effectuées entre entités ayant, directement ou indirectement, des liens en capital conférant à l’une des entreprises liées un pouvoir de contrôle effectif sur les autres (c. monétaire et financier, art. L.511-7, 3) ;
- Elles doivent être appréciées au prisme de la règlementation relative aux conventions réglementées. Si elles ne présentent pas, en tant que telles, de caractère inhabituel au sein d’un même groupe et peuvent être considérées comme courantes, il n’en n’est pas de même des conditions financières appliquées qui ne doivent pas être anormales (CA Versailles, chambre commerciale, 2 avril 2022, n° 3930) ;
- Pour échapper à la qualification d’abus de biens sociaux, elles doivent respecter - comme toute opération intragroupe - les trois critères cumulatifs posés par l’arrêt Rozenblum, fondateur en la matière (Cass. crim. 4 février 1985, n° 84-91.581) : l’opération sert un intérêt économique, social ou financier commun au groupe ; elle ne doit ni être démunie de contrepartie, ni rompre l’équilibre entre les engagements respectifs des diverses sociétés concernées ; elle ne doit pas excéder les possibilités financières de celle qui la supporte.
Par un récent arrêt n° 470887, du 8 novembre 2024, le Conseil d’État est venu compléter ce cadre d’ensemble en posant les conditions permettant aux avances en compte courant d’échapper à la qualification fiscale de libéralité, et partant, à leur soumission à l’impôt sur les sociétés entre les mains de la bénéficiaire.
A l’occasion d’une vérification de comptabilité, l’administration fiscale constate l’existence d’un compte courant débiteur ouvert par une société mère au nom d’une de ses filiales. Elle relève, dans le même temps, l’absence de convention de trésorerie entre les deux sociétés. Elle adresse alors une proposition de rectification à la filiale bénéficiaires des sommes, au motif que les sommes débitées doivent être qualifiées d’avantage occulte octroyés par la mère, constitutifs de revenus distribués imposables sur le fondement de l’article 111, c, du CGI.
Les juges du fond font droit aux demandes de l’administration fiscale. La société redressée introduit un pourvoi devant le Conseil d’État.
Pour le Conseil d’Etat, l’existence d’une libéralité n’est pas la solution à retenir. Il pose la règle selon laquelle la caractéristique essentielle des sommes inscrites en compte courant est d’être, sauf convention particulière ou statutaire régissant le compte courant, remboursable à tout moment : dès lors que la société mère inscrit une somme au débit d’un compte courant ouvert au nom de sa filiale et que cette dernière inscrit réciproquement la même somme au crédit d’un compte courant ouvert au nom de la société mère, l’opération est présumée, sauf preuve contraire, constituer une avance et non une libéralité.
Est donc posé, au regard du droit fiscal, le principe général d’une présomption simple d’avance en compte courant en présence d’une inscription symétrique d’une même somme dans les comptes courants, respectivement débiteur et créditeur, d’une société prêteuse et d’une société emprunteuse liées, nonobstant l’absence de convention de trésorerie.
Cette règle vient apporter un tempérament au cadre général de mise en œuvre des avances en compte courant, vu sous l’angle du droit fiscal.