Quatre textes relatifs à la CSRD ( Corporate Sustainability Reporting Directive) et à la profession ont été publiés en fin d’année dernière :
L’ordonnance n°2023-1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d’informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d’entreprise des sociétés commerciales publiée au Journal officiel du 6 décembre 2023 ainsi qu’un décret (n°2023-1394) du 30 décembre 2023 pris en application de ladite ordonnance. Deux arrêtés du 28 décembre 2023 ont été également adoptés : l’un modifie les textes du code de commerce afférents aux commissaires aux comptes, le second est spécifique à l’application de l’article 37 de ladite ordonnance. Les trois derniers textes ont été publiés au Journal officiel du 31 décembre 2023. L’ordonnance transpose notamment la directive n° 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) nº 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises, et prend les mesures de coordination et d'adaptation de la législation liées à cette transposition.
Sauf dispositions spécifiques, l’ordonnance entre en vigueur le 1er janvier 2024. Elle est structurée ainsi :
- Titre 1er Dispositions modifiant le code de commerce ;
- Chapitre 1er Dispositions relatives à la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises ;
- Chapitre 2 Dispositions relatives à la certification des informations en matière de durabilité ;
- Titre II Dispositions modifiant d'autres codes et lois ;
- Titre III Dispositions de coordination, transitoires et finales.
Au-delà de la modification du fond des textes, l’ordonnance modifie la structure du Titre II du Livre VIII qui est consacré aux commissaires aux comptes : celui-ci est désormais intitulé « Des commissaires aux comptes, des organismes tiers indépendants et des auditeurs des informations en matière de durabilité »
La Haute Autorité de l’Audit (H2A) se substitue au Haut Conseil du Commissariat aux Comptes (H3C)
Les dispositions relatives à l’organisation du H3C, devenu H2A, sont placées en tête avec un chapitre préliminaire intitulé « De la Haute autorité de l'audit » (Articles L820-1 à L820-24).
Comme l’indique le Rapport à Monsieur le Président de la République :
« L'organisation de la nouvelle Haute autorité est modifiée par rapport à celle du Haut conseil du commissariat aux comptes, pour être désormais strictement divisée entre le collège et une commission des sanctions. La composition de ces deux organes est adaptée pour y intégrer des personnalités compétentes en matière de durabilité (article L. 820-2). Sont également instaurées deux commissions de normalisation, dont la composition resserrée est prévue pour assurer efficacité et compétence (article L. 820-4). Ces commissions remplacent l'actuelle commission paritaire instituée auprès du Haut conseil du commissariat aux comptes et ont vocation à élaborer des projets de normes d'exercice professionnel sur l'ensemble des matières couvertes par la H2A, l'une concernant la mission d'audit des informations de durabilité et l'autre les autres activités des commissaires aux comptes. »
Le CAC et la certification des informations en matière de durabilité
Les dispositions spécifiques aux commissaires aux comptes intègrent cette nouvelle mission relative à la durabilité en créant notamment deux listes d’inscription, l’une d’elles étant réservée aux personnes physiques aptes à mener des missions de durabilité (L821-13 C. com.), avec des conditions spécifiques à chacune (L821-14 et L821-18 C.com.).
L’article L821-54 (ex. L823-10) du code de commerce intègre notamment l’intervention du CAC dans le cadre de la durabilité en précisant :
« II.-Lorsque l'entité est soumise aux dispositions des articles L. 22-10-36, L. 232-6-3 et L. 233-28-4, les commissaires aux comptes désignés à cette fin émettent un avis portant sur le respect des exigences prévues à ces mêmes articles ainsi que sur :
1° La conformité des informations en matière de durabilité avec les exigences de la directive 2013/34/ UE, y compris avec les normes d'information en matière de durabilité adoptées en vertu de ses articles 29 ter ou 29 quater ;
2° La conformité aux normes mentionnées au 1° du processus mis en œuvre par l'entité pour déterminer les informations publiées et, lorsque l'entité y est soumise, le respect de l'obligation mentionnée au sixième alinéa de l'article L. 2312-17 du code du travail ;
3° La conformité du balisage de l'information en matière de durabilité prévue à l'article 29 quinquies de la directive précitée ;
4° Le respect des exigences de publication des informations prévues à l'article 8 du règlement (UE) 2020/852.
Cet avis fait l'objet d'un rapport de certification destiné à l'organe destiné à statuer sur les comptes. »
L’ensemble des dispositions relatives à l’exercice de la mission ont été adaptées à l’élargissement de l’intervention du CAC à cette mission.
Notions de missions et prestations
La profession de commissaire aux comptes est désormais ainsi définie par l’article L821-3 C. com. :
« La profession de commissaire aux comptes consiste en :
1° L'exercice de missions au sens du III de l'article L. 821-2 ; et
2° La fourniture de prestations au sens du IV du même article. »
Cet article L821-2 définit en son III et IV les termes de mission et prestation comme suivant :
« III.-Pour l'application du présent titre, le terme : “ mission ” désigne la mission de certification des comptes, la mission de certification des informations en matière de durabilité ou toute autre mission confiée au commissaire aux comptes par la loi ou le règlement.
IV.-Pour l'application du présent titre, le terme : “ prestation ” désigne la fourniture de services et d'attestations qui ne relèvent pas d'une mission. »
Modalités d’exercice des missions : précisions et compléments
Par ailleurs, des modifications de la déontologie, des obligations et certaines modalités d’exercice ont été modifiées :
- Le CAC doit signaler les irrégularités à l’assemblée générale, ou son équivalent, et à la direction de l’entité dans le cadre des missions et prestations qu’il réalise,
- En cas de fait délictuel, le CAC doit révéler ce fait au Procureur de la République dans le cadre de toute mission ou prestation,
- Le Secret professionnel est levé entre le CAC en charge de la certification des états financiers et celui en charge de la durabilité (ou l’OTI),
- En ce qui concerne l’exercice du commissariat en société, le texte prévoit désormais que la profession de commissaire aux comptes (mission + prestation) ne peut être exercée que dans une société. Une dérogation à cette limitation est toujours prévue mais elle a évolué et prévoit désormais :
« Par dérogation au premier alinéa l'exercice de la profession est possible simultanément au sein d'un ensemble de sociétés de commissaires aux comptes formé par une société consolidante et des sociétés de commissaires aux comptes comprises dans la consolidation au sens du chapitre III du titre III du livre II du présent code. »
Des dispositions transitoires attendues se retrouvent en fin d’ordonnance :
- L'article 37 constitue la « clause de grand-père » pour les commissaires aux comptes et les membres des organismes tiers indépendants inscrits ou accrédités avant le 1er janvier 2026. Ils sont dispensés des exigences supplémentaires liées au stage professionnel et à l'épreuve de durabilité lorsqu'ils justifient avoir validé une formation homologuée par la Haute autorité de l'audit.
- L'article 38 prévoit que la durée du premier mandat du commissaire aux comptes ou de l'organisme tiers indépendant peut, par dérogation, être plus courte que la durée de droit commun de six ans.
Les précisions apportées par le décret d’application :
Le décret précise les seuils applicables aux définitions des différentes tailles de sociétés et de groupes de sociétés. Il détermine le type d’informations en matière de durabilité devant être établies et publiées par les sociétés concernées.
A la suite de l’ordonnance, il modifie la structure et les dispositions du titre II du livre VIII du code de commerce relatif aux commissaires aux comptes et les adapte à la mission de certification des informations en matière de durabilité. Le 1er chapitre porte sur la nouvelle H2A, le deuxième est spécifique aux commissaires aux comptes ; le troisième portant sur les organismes tiers indépendants et les auditeurs des informations en matière de durabilité. Il précise, par ailleurs, les règles applicables au rapport financier annuel des émetteurs.
Le décret rappelle les seuils applicables relatifs à la durabilité, à la nomination obligatoires des commissaires aux comptes, y compris les seuils intermédiaires dans le cadre du dispositif dit petit groupe. Il précise également les seuils applicables aux obligations de présentations des informations relatives à la durabilité.
Seuils des différentes sociétés et groupes :
Seuils d’application des obligations relatives à la durabilité
Contenu du rapport de durabilité :
- Les arrêtés d’application de l’article 37 de l’ordonnance et de modification des dispositions du code de commerce relatives aux CAC:
L’article 37 de l’ordonnance prévoit le régime transitoire permettant aux commissaires aux comptes, inscrits avant le 1er janvier 2026, d’être dispensés de l’épreuve obligatoire et du stage de 8 mois s’ils suivent une formation, homologuée par la H2A, de 90 heures, décomptée dans les 120 heures de formation obligatoires. L’accomplissement de cette formation doit être justifié auprès du H3C.
Par ailleurs, sont pris en compte, dans la limite de 30h, des activité et expériences suivantes :
- La conception ou la dispense de tout ou partie d’une formation homologuée par la Haute autorité de l’audit
- La vérification des informations figurant dans les déclarations de performance extra-financière
- L’arrêté modifiant le titre du code de commerce relatif aux commissaires aux comptes :
Cet arrêté apporte plusieurs précisions concernant les diplômes et les examens permettant l’accès au commissariat aux comptes y compris à la certification de durabilité. Il précise également les conditions de prise en comptes de la formation ainsi l’obligation de formation continue est satisfaite par :
1° Par la participation à des séminaires de formation, à des programmes d'autoformation encadrée ou à des formations ou enseignements à distance ;
2° Par l'assistance à des colloques ou à des conférences dans la limite de 45 heures au cours de trois années consécutives (au lieu de quarante heures) ;
3° Par la conception ou l'animation de formations, de colloques, de conférences ou d'enseignements, dans un cadre professionnel ou universitaire dans la limite de 20 heures par an (au lieu de quarante heures au cours de trois années consécutives) ;
4° Par la rédaction et la publication de travaux à caractère technique dans la limite de trente heures au cours de trois années consécutives ;
5° Par la participation à des travaux à caractère technique dans la limite de 20 heures par an (au lieu de trente-deux heures au cours de trois années consécutives) ;
6° Par la participation au programme de formation continue particulière prévue au II de l'article L. 821-24.